Affaire Mis et Thiennot : deux livres réfutent le « roman » de Boizeau

Raymond Mis et Gabriel Thiennot ont été reconnus coupables pour le meurtre de Louis Boistard lors d’une partie de chasse en 1946. Ils ont purgé leur peine et se sont fait oublier pendant de nombreuses années. Mais en 1980 Léandre Boizeau, maire-adjoint communiste de la ville du Blanc, sort un livre intitulé « Ils sont innocents » où il développe la thèse de l’erreur judiciaire et de l’innocence des deux condamnés. Fort des troupes militantes du Parti communiste de l’époque, de ses relations dans la bourgeoisie socialiste et de l’avidité des médias pour ce genre de thème, Léandre Boizeau parviendra à imposer  » sa  » vérité à l’opinion médiatique mais pas à l’institution judiciaire. Alors qu’il a déposé l’année dernière, avec la complicité du député macroniste François Jolivet, un énième recours pour réhabiliter les deux chasseurs, deux nouveaux livres viennent confirmer la culpabilité de Raymond Mis et de Gabriel Thiennot dans ce crime affreux de l’après-guerre.

La Fabrique des Innocents
Gilles Antonowicz est avocat à la retraite et historien. Il s’est fait une spécialité dans l’examen minutieux de grandes affaires judiciaires telles que l’affaire d’Outreau ou l’affaire Halimi. En 2022, il a publié avec Isabelle Marin un livre intitulé La Fabrique des Innocents avec le sous-titre évocateur suivant :   » L’affaire Mis et Thiennot – Histoire d’une manipulation médiatique « . Son propos est sans ambiguïté. Raymond Mis et Gabriel Thiennot ont été reconnus coupables du meurtre du garde-chasse par trois différentes cours d’assises. Leur culpabilité ne fait aucun doute. Ils sortent de prison en 1954, refont leur vie et pendant 26 ans on n’entend plus parler d’eux. Mais en 1980, un militant communiste, adjoint au Maire du Blanc, sort un livre clamant leur innocence et l’erreur judiciaire. Son nom est Léandre Boizeau. À cette époque le Parti Communiste est extrêmement bien implanté dans le département et tout de suite le livre « Ils sont innocents » est un véritable succès. Un comité de soutien composé de militants socialistes et communistes est créé dans la foulée pour demander la révision des procès. Pour Maître Antonowicz, c’est en 1980 que commence réellement l’affaire Mis et Thiennot et non en 1946. C’est à partir du bouquin de Boizeau que les médias locaux puis nationaux vont faire leurs choux gras de cette triste affaire. L’extrême médiatisation « d’hypothèses et de rumeurs comme étant l’expression de la vérité » pendant des décennies a permis de manipuler l’opinion au point que pour tous ou presque : « Mis et Thiennot ont été victimes d’une erreur judiciaire ! »

Affaire Mis et Thiennot, La Contre-Enquête
Jean-Louis Vincent est lui un ancien commissaire de police. Il se passionne également pour les grandes affaires criminelles célèbres. Son livre est sorti à quelques jours de celui de Me Antonowicz. Il s’intitule sobrement « Affaire Mis et Thiennot – La Contre-Enquête ». Ce gros livre de plus de 400 pages s’attelle essentiellement à reprendre les multiples dépositions des différents protagonistes pour les confronter et les mettre en perspective. C’est un travail méticuleux qui permet, entre autres, au lecteur de se faire une opinion sur les incroyables accusations de « torture » qui ont été proférées à l’encontre des policiers ayant mené l’enquête. On y découvre qu’au fil du temps les déclarations des mis en cause ont beaucoup évolué, parlant dans un premier temps de « pressions » psychologiques, puis d’un simple « coup de pied aux fesses », puis de « nombreux coups », pour finir par des scènes dignes d’un film d’horreur avec du « sang sur les murs ». Cela ne tient pas la route un seul instant. Pour l’ex-commissaire Vincent, la culpabilité de Raymond Mis et Gabriel Thiennot est « avérée » même s’il note des manquements regrettables dans la menée de l’enquête policière. De son point de vue, si Mis et Thiennot finissaient par être réhabilités, cette décision « sonnerait comme un désaveu de l’institution judiciaire ».

Le « roman de Boizeau »
Il faut dire que la thèse de l’innocence de Raymond Mis et de Gabriel Thiennot développée par Léandre Boizeau s’apparente plus à un roman de gare tendance « lutte des classes » qu’à une contre-enquête sérieuse. Le « roman de Boizeau » repose sur deux convictions issues de la mythologie d’extrême-gauche mais démenties par les faits.
Première idée fausse, Mis et Thiennot auraient été désignés coupables parce qu’ils étaient pauvres. Léandre Boizeau nous fait le coup des gentils prolétaires contre le méchant propriétaire capitaliste. En effet, il prétend que les pauvres Mis et Thiennot seraient victimes d’une machination ourdie par les « puissants ». En filigrane, apparaît l’ombre de Jean Lebaudy, grand propriétaire terrien et employeur du malheureux Louis Boistard. Même s’il n’accuse pas directement le patron du garde-chasse du meurtre de ce dernier, il laisse planer le doute de son implication éventuelle à de nombreuses reprises. Il lui reproche notamment d’avoir payé un avocat réputé (donc fort cher) pour défendre les intérêts de la veuve Boistard aux procès et d’avoir récompensé les policiers pour leur travail dans cette affaire. Pourtant, il ne livre aucun élément prouvant que Jean Lebaudy ait eu un intérêt quelconque à faire accuser des innocents pour ce crime.
Deuxième idée fausse, les aveux de Mis et Thiennot auraient été obtenus par l’usage de la « torture », donc ils sont innocents. Il s’agit là d’un raisonnement simpliste issu du catéchisme gauchiste sur la dénonciation perpétuelle des « violences policières ». Bien que la réalité de la « torture » dans cette affaire soit très discutable comme le démontre Jean-Louis Vincent dans son livre, il nous rappelle surtout que : « la commission de brutalités à l’encontre d’une personne ne peut pas suffire à établir son innocence ». Ainsi, même si Raymond Mis et Gabriel Thiennot ont été brutalisés, cela ne prouve en rien qu’ils soient innocents. On peut très bien être frappé par la police et en même temps être coupable du crime dont celle-ci vous accuse.
La vérité, c’est que même sans leurs aveux, Raymond Mis et Gabriel Thiennot auraient été tout de même condamnés. Le faisceau de preuves qui les désigne coupables n’a pas besoin de leurs aveux. Et la Cour de révision devrait en toute logique rejeter une nouvelle fois la demande de révision du Sieur Boizeau.

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